Diagnostic de la surdité : comprendre les examens médicaux pas à pas

7 octobre 2025

Pourquoi et quand rechercher une surdité ?

Repérer une baisse d’audition, c’est offrir à l’enfant ou à l’adulte toutes les chances d’accès au langage, à la scolarisation ou à l’autonomie. Le diagnostic précoce est crucial : la Haute Autorité de Santé rappelle qu’une prise en charge avant 6 mois multiplie par 2 voire 3 les possibilités de développement du langage (source : HAS, 2020).

  • Chez le tout-petit : Retards de langage, absence de réaction aux sons, cris monotones…
  • Chez l’enfant : Difficultés scolaires, réponses inadaptées, isolement en groupe…
  • Chez l’adulte : Impression que les autres “articulent mal”, augmentations du volume sonore, fatigue en conversation, difficultés sociales.

Face au moindre doute, le professionnel de santé (médecin, pédiatre, ORL) est le premier relais. Voyons les étapes clés du diagnostic.

Les principaux examens médicaux pour diagnostiquer une surdité

1. Le dépistage néonatal de la surdité

Depuis 2012, le dépistage de la surdité est généralisé à la naissance dans les maternités françaises. Deux tests non-invasifs et indolores sont utilisés :

  • Otoémissions acoustiques (OEA) : Elles consistent à mesurer la réponse de l’oreille interne à un souffle sonore. Si les OEA sont présentes, l’audition est a priori normale. Ce test prend quelques minutes, pendant que le bébé dort.
  • Potentiels évoqués auditifs automatisés (PEAA) : Si les OEA sont absentes ou douteuses, les PEAA vérifient la bonne transmission du signal sonore jusqu’au cerveau. De petits électrodes sont posés sur le crâne et l’oreille. Cet examen objective les troubles auditifs chez le nouveau-né (source : Ministère de la Santé).

Selon la Fédération Nationale des Sourds de France, en 2021, près de 825 000 bébés ont ainsi été dépistés, avec un taux de détection d’une surdité profonde autour de 1,5 pour 1000 naissances (FNSF).

2. Examen clinique et entretien

Quelle que soit l’âge, le médecin ORL commence par une observation clinique :

  • Recherche de bouchon de cérumen, infection ou malformation de l’oreille
  • Entretien avec la famille (antécédents familiaux, grossesse, maladies, facteurs de risques…)
  • Observation du comportement auditif

Ce premier bilan guide le choix des examens suivants.

3. L'audiométrie

L’audiométrie est la pierre angulaire du diagnostic chez l’enfant et l’adulte.

  1. Audiométrie tonale (subjective) :
    • Le patient se trouve dans une cabine insonorisée ; il répond (bouton, geste) quand il entend des sons de différentes fréquences et intensités présentés par un casque.
    • L’audiogramme obtenu permet d’estimer la perte auditive, de chaque oreille, en décibels (dB).

    Une audition normale se situe entre -10 et 20 dB. Les seuils de déficience auditive sont fixés à 20 dB ou plus (OMS : OMS 2021).

  2. Audiométrie vocale :
    • Évaluation de la capacité à comprendre la parole (dans le silence ou dans le bruit) : répétition de listes de mots à différents volumes.

    La compréhension est parfois altérée dès les pertes légères, d’où l’importance de compléter les tests purement “sonores”.

4. Les examens objectifs de l'audition

Certains tests permettent de mesurer l’audition en dehors de toute participation active, particulièrement utiles chez le jeune enfant, les personnes non-verbales ou en situation de handicap.

  • Otoémissions acoustiques (OEA) : (Voir partie dépistage néonatal)
  • Potentiels évoqués auditifs (PEA ou BERA) : Mesurent l’activité électrique du cerveau en réponse à un son. Ils précisent le seuil auditif réel, la localisation de la lésion (oreille moyenne, interne, voie nerveuse) et sont incontournables dans l’évaluation des surdités profondes ou rétrocochléaires.
    • Ils peuvent être automatisés (“screening”) ou conventionnels (plus complet, réalisé en centre spécialisé, souvent sous légère sédation).
  • Impedancemétrie (ou tympanométrie) : Vérifie l’état du tympan et la mobilité de la chaîne des osselets. Sert principalement à différencier une surdité de transmission (pouvant être corrigée : otite, bouchon…) d’une surdité neurosensorielle.

5. Examens complémentaires selon la situation

Lorsque le bilan de base confirme ou suspecte une surdité, d’autres explorations sont possibles pour guider le traitement ou comprendre la cause.

  • Bilan génétique : Jusqu'à 60 % des surdités congénitales seraient d'origine génétique (source : ORPHANET). Une consultation génétique est alors proposée, pour compléter le diagnostic, anticiper d’autres retentissements ou accompagner les familles.
  • Imagerie médicale : Un scanner ou une IRM de l’oreille interne et du cerveau peuvent être nécessaires en cas de malformation, suspicion de tumeur, ou de surdité unilatérale soudaine.
  • Bilan vestibulaire : Si des troubles de l’équilibre accompagnent la perte auditive, des tests spécifiques étudient l’appareil vestibulaire.
  • D’autres bilans : (sanguins, électrocardiogramme, examens ophtalmologiques…) selon le contexte, notamment en cas de surdité associée à d’autres anomalies (“syndromiques”).

Plusieurs hôpitaux de la région Auvergne-Rhône-Alpes, notamment à Lyon et Grenoble, disposent de services d’exploration auditive avancée adaptés aux enfants et adultes sourds (source : CHU Lyon).

Comment se passe le parcours de diagnostic en pratique ?

Le diagnostic est un processus souvent jalonné d’émotions et de doutes, surtout lorsqu’il concerne un tout-petit. Plusieurs phases se succèdent :

  1. Dépistage initial : à la maternité, ou par le médecin traitant ou l’école pour les enfants non dépistés à la naissance.
  2. Confirmation du trouble : chez un médecin ORL (cabinet liberal, consultation hospitalière ou dans les CAMSP pour les moins de 6 ans).
  3. Évaluation de la sévérité : audiométrie, PEA, bilan orthophonique parfois proposé.
  4. Recherche de la cause : bilan génétique, imagerie, exploration des troubles associés.
  5. Information et orientation : le diagnostic s’accompagne d’informations claires données aux familles : perspectives d’évolution, modalités de communication possibles, prise en charge en Haute-Savoie (centres spécialisés, associations familiales, MDPH, etc.).

À noter : La Loi 2005 sur le handicap impose l’accès à un diagnostic précoce et à une information éclairée. Les familles peuvent demander un second avis médical, et sont accompagnées par l’Assurance Maladie et la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées), en lien avec les établissements de santé locaux.

Comprendre les résultats et leurs implications

Les résultats des examens sont souvent restitués sous forme d’un audiogramme : une courbe qui visualise la perte auditive selon les fréquences. Quelques repères pratiques :

  • De 20 à 40 dB : surdité légère ; certaines consonnes, bruits faibles sont peu perçus
  • De 40 à 70 dB : surdité moyenne ; la parole ordinaire est difficilement comprise
  • De 70 à 90 dB : surdité sévère ; seule une forte intensité sonore est perçue
  • Au-delà de 90 dB : surdité profonde ; seul le bruit le plus fort (avion, marteau-piqueur) est détecté

La nature de la surdité (de perception, de transmission, mixte) guide ensuite le traitement : prothèses auditives, implant cochléaire, appareillage adapté, suivi orthophonique, accès à la langue des signes, choix de communication, etc.

Un chiffre à retenir : 94 % des enfants issus du dépistage néonatal bénéficient d’une prise en charge adaptée avant leurs 12 mois lorsque le diagnostic est affirmé précocement (source : Ministère de la Santé).

Quelques conseils pratiques pour les familles et proches

  • N’hésitez jamais à demander des explications complètes lors des examens : chaque résultat doit être commenté, schématisé si besoin.
  • Ne restez pas isolés : des associations existent en Haute-Savoie (APEDA, FNSF, SURDI 74…) pour accompagner, témoigner, partager des expériences vécues lors du parcours diagnostic (APEDA 74).
  • Gardez précieusement tous les comptes-rendus, audiogrammes et documents : ils construisent le “dossier auditif” indispensable à la prise en charge, aux démarches auprès de la MDPH ou de l’Éducation Nationale.
  • En cas de doute ou de difficulté à comprendre certains mots médicaux, demandez un exemplaire ou la référence d’un glossaire (ex : glossaire de SurdiFrance).
  • En Haute-Savoie, la prise de rendez-vous avec un ORL peut parfois demander quelques semaines de délai : en cas d’urgence, contactez le service ORL du CH Annecy Genevois ou les plateformes régionales de dépistage.

Pour aller plus loin : l’accompagnement avant, pendant et après le diagnostic

Le diagnostic de la surdité n’est pas une fin, mais bien le début d’une nouvelle histoire : celle de l’accès à la communication, à la scolarité, à la vie sociale et à l’autonomie. Chaque parcours est unique. Les examens médicaux ont pour but de fournir une photo précise de la situation auditive, mais aussi d’ouvrir le dialogue sur tous les choix possibles d’accompagnement.

En Haute-Savoie, comme partout en France, le repérage, l’annonce du diagnostic et l’information donnée aux familles évoluent vers plus de clarté, d’accessibilité, de respect des choix de communication et d’inclusion. Parce que diagnostiquer tôt, c’est offrir à chacun un tremplin vers une vie pleine et épanouie, quel que soit le degré de surdité.

Pour toute question ou démarche, n’hésitez pas à explorer les ressources, guides pratiques et adresses locales réunis sur ce blog, ou à solliciter les relais associatifs du département.

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