Surdité et génétique : Distinguer l’hérédité au cœur des causes

13 septembre 2025

Surdité d’origine génétique : de quoi parle-t-on ?

Contrairement à une idée répandue, la surdité n’est pas toujours déclenchée par des causes extérieures comme une infection ou un traumatisme. Une part importante des cas serait liée, directement ou non, à un patrimoine génétique spécifique. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estime qu’environ 60% des surdités infantiles ont une cause génétique (OMS). Mais que signifie réellement une surdité « génétique » ?

  • Une origine génétique implique qu’une mutation de l’ADN transmise par un ou deux parents – parfois sans qu’aucun d’eux ne soit atteint – entraîne la surdité.
  • Les surdités génétiques ne sont pas toutes apparentées à des antécédents familiaux visibles : il existe de nombreux cas de mutations « de novo », spontanées sans transmission directe.
  • La surdité peut s’exprimer seule (surdité isolée, dite « non syndromique »), ou accompagnée d’autres troubles dans le cadre d’un syndrome génétique (surdité « syndromique »).

Quelques chiffres éclairants sur la surdité génétique

En France, comme ailleurs, les statistiques insistent sur l’importance d’une démarche d’identification précoce et d’accompagnement adaptée. Voici quelques repères essentiels :

  • 1 naissance sur 1 000 est concernée par une surdité permanente avérée (Société Française d’Audiologie).
  • Parmi ces cas, 8 à 9 sur 10 sont d’origine génétique pour les surdités congénitales (Orphanet).
  • Selon les régions d’Europe, les mutations génétiques les plus fréquentes ne sont pas partout les mêmes, ce qui souligne l’impact des lignées familiales et des migrations anciennes.
  • Environ 130 gènes différents sont aujourd’hui identifiés dans la surdité héréditaire (GeneReviews®).

Les mécanismes de la surdité génétique : comprendre les formes principales

La surdité non syndromique

La majorité des surdités génétiques sont dites « non syndromiques » : elles touchent uniquement l’audition, sans autre signe associé. Dans ce groupe, la transmission (de parent à enfant) peut suivre différents schémas :

  • Transmission autosomique récessive (environ 75% des cas) : chaque parent porte une mutation sur un même gène sans être lui-même atteint. L’enfant doit hériter des deux copies mutées pour présenter la surdité. À titre d’exemple, le gène GJB2 (codant pour la connexine 26) est responsable d’environ 50% des cas de surdité congénitale autosomique récessive en Europe (Orphanet).
  • Transmission autosomique dominante : un seul parent peut transmettre la mutation et la surdité concerne souvent plusieurs générations. Cette forme représente 15 à 20% des cas.
  • Transmission liée à l’X : plus rare, cette forme touche principalement les garçons lorsque la mutation est portée sur le chromosome X.

La surdité syndromique

Dans 20 à 30% des cas génétiques, la surdité s’accompagne d’autres troubles : vision, troubles cardiaques, atteintes rénales… On parle alors de « syndrome génétique ». Parmi les syndromes connus :

  • Syndrome de Pendred : association à une atteinte de la thyroïde et des malformations de l’oreille interne.
  • Syndrome de Waardenburg : marquée par des particularités de la couleur des yeux, des cheveux, parfois une hypopigmentation de la peau.
  • Syndrome d’Usher : surdité congénitale avec apparition progressive d’une atteinte visuelle (rétinite pigmentaire).

Le repérage précoce de ces syndromes est essentiel pour anticiper l’accompagnement adapté et informer correctement la famille.

Quand faut-il s’interroger sur l’origine génétique d’une surdité ?

La question génétique se pose :

  • En cas de surdité détectée chez un très jeune enfant, et particulièrement en l’absence de cause infectieuse ou environnementale connue.
  • Face à une histoire familiale où plusieurs membres présentent une surdité, même sous des formes variées.
  • Si d’autres signes cliniques (de la vision, du développement, du tonus musculaire…) accompagnent la surdité.

Un médecin ORL, un généticien ou une équipe de centre de référence maladies rares orientent alors vers un bilan génétique. Ce dépistage, réalisé par une prise de sang ou un prélèvement salivaire, permet d’identifier la mutation impliquée lorsque celle-ci est connue.

L’annonce d’une surdité génétique : quelles implications pour la famille ?

Découvrir l’origine génétique de la surdité d’un enfant entraîne des réactions fortes : culpabilité, inquiétude pour d’autres enfants, sentiment d’isolement… Pourtant, cette annonce n’est ni une fatalité, ni un verdict inévitable sur le futur de l’enfant.

  • Connaître la cause aide à anticiper le parcours de soins et à adapter l’accompagnement éducatif et social.
  • Certains diagnostics de surdité syndromique permettent une surveillance médicale et parfois une réponse thérapeutique (en particulier pour la vision, la thyroïde…).
  • Le conseil génétique propose des informations personnalisées sur le risque de transmission pour d’autres enfants de la fratrie ou des petits-enfants.

Génétique et surdité : de la recherche à l’accompagnement local

L’importance du repérage et du dépistage précoce

  • En Haute-Savoie, le dépistage auditif néonatal est systématique dans les maternités depuis 2012.
  • Si une anomalie est détectée, un suivi spécifique s’organise au Centre d’Action Médico-Sociale Précoce (CAMSP) ou dans un service ORL hospitalier tel que celui du Centre Hospitalier Annecy-Genevois.

Avec un diagnostic rapide, la prise en charge orthophonique, pédagogique et les soutiens à la parentalité se mettent en place au bon moment. Ce maillage local évite d’ajouter une errance de diagnostic à la difficulté initiale.

L’impact de la recherche

Les progrès de la génétique offrent des pistes porteuses d’espoir. Depuis 2023, plusieurs équipes françaises sont mobilisées sur des projets de « médicaments génétiques » (thérapie génique), notamment pour la surdité liée à la mutation du gène OTOF (Inserm).

  • Les premiers essais sont menés chez des enfants, dans l’idée de réparer la fonction auditive grâce à la correction de l’anomalie génétique.
  • À ce jour, ces protocoles restent expérimentaux, mais ouvrent la voie à de nouvelles perspectives pour les générations à venir.

Questions courantes sur la génétique de la surdité

  • Peut-on prévenir une surdité génétique ? Les mutations génétiques ne sont pas prévenues à ce jour. Cependant, des avancées en diagnostic prénatal peuvent accompagner les familles à risque connu.
  • Est-il possible d’avoir un enfant sans surdité ? Oui, même dans une famille touchée, car tout dépend du type et du mode de transmission de la mutation.
  • Les enfants sourds peuvent-ils transmettre leur surdité ? Oui, en fonction du gène en cause et de la génétique de l’autre parent.

Des ressources pour s’informer et se faire accompagner

  • Génétique et Surdité (CHU de Lyon) : consultations et informations claires (CHU Lyon).
  • La Fédération Nationale des Sourds de France (FNSF), et Surdi Info Service apportent une écoute et des ressources pratiques.
  • Les centres de référence maladies rares proposent en cas de suspicion de syndrome un accompagnement médical pluridisciplinaire.
  • Les associations locales, telles que l’Association des Parents d’Enfants Déficients Auditifs (APEDA 74), soutiennent les familles à chaque étape, notamment dans les démarches MDPH ou le lien avec les établissements scolaires.

Perspectives et pistes d’écoute en Haute-Savoie

Grâce à une mobilisation toujours plus forte autour du dépistage, de la recherche, et de l’écoute des familles, la compréhension de la surdité génétique progresse. S’informer sur ce sujet, c’est permettre à chaque enfant, chaque famille, de tracer un parcours singulier vers l’autonomie. Que la surdité touche votre histoire de près ou de loin, il existe sur le territoire des relais, des professionnels engagés et des outils pour lever les doutes et avancer dans la sérénité. La génétique éclaire aujourd’hui bien des mystères de la surdité : comprendre son impact, c’est aussi renforcer la capacité collective à rendre la société plus accueillante pour tous, en Haute-Savoie et ailleurs.

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