Comprendre la surdité liée au bruit : signes, risques et solutions concrètes

23 septembre 2025

Qu’est-ce que la surdité liée au bruit ?

La surdité liée au bruit, qu’on appelle aussi surdité professionnelle ou surdité par traumatisme sonore, est l’une des formes de perte auditive les plus répandues dans les sociétés modernes. Exposition aux concerts, travail en usine, circulation dense, bricolage ou écoute prolongée de musique au casque… Le bruit est partout dans notre quotidien, et ses effets sur nos oreilles sont souvent sous-estimés.

En France, l’Institut National de Recherche et de Sécurité (INRS) estime qu’environ 3 millions de salariés sont exposés à des niveaux de bruit dangereux chaque jour (INRS). Et selon l’OMS, plus d’1,1 milliard de jeunes entre 12 et 35 ans risquent une perte auditive à cause de pratiques d’écoute trop bruyantes (Organisation Mondiale de la Santé).

Contrairement à d’autres formes de surdité, celle liée au bruit se développe souvent de façon insidieuse : pas de douleur, pas de signe spectaculaire, mais une perte, souvent irréversible, qui s’installe lentement.

Comment le bruit abîme-t-il l’oreille ?

Pour comprendre comment le bruit peut provoquer une surdité, il faut savoir que l’oreille interne abrite des cellules très fragiles : les cellules ciliées. Lorsqu’un son trop fort est perçu, ces cellules subissent une agression mécanique. À la longue – ou suite à un bruit excessivement intense d’un coup –, elles se dégradent, et ne se régénèrent pas.

  • Des bruits de courte durée, très forts (détonation, feu d’artifice, explosion), peuvent casser brutalement ces cellules : c’est le traumatisme sonore aigu.
  • Des expositions répétées à des niveaux moyens à élevés (usine, tondeuse, moto, musique forte…) finissent par abîmer progressivement l’oreille : c’est la surdité progressive liée au bruit.

Le seuil qui commence à présenter un risque pour l’audition est fixé à 85 décibels (dB) pour une exposition prolongée (8h de travail par exemple). Or, un concert peut dépasser 100 dB, un baladeur musique à fond tutoyer les 110 dB, et une perceuse atteindre 95 dB.

Comment reconnaître les premiers signes d’une surdité liée au bruit ?

Malheureusement, la perte auditive due au bruit ne se voit pas. Mais certains signes doivent alerter, surtout chez les adultes actifs ou les jeunes pratiquant des loisirs bruyants :

  • Sensation de bourdonnements ou de sifflements dans les oreilles, appelés également acouphènes
  • Difficultés à comprendre les conversations dans le brouhaha (café, restaurant, réunions…)
  • Tendance à augmenter le volume de la télévision ou du téléphone
  • Impression que ses interlocuteurs "mâchent" leurs mots
  • Fatigabilité accrue, difficulté à suivre les échanges en groupe

La surdité d’origine acoustique touche en priorité les fréquences aiguës, celles qui sont importantes justement pour bien comprendre la parole, mais aussi pour repérer certains signaux d’alerte (cris, sirènes, alarmes…).

Chez les enfants et les jeunes, la perte auditive peut entraîner des difficultés scolaires, de concentration, ou une tendance à l’isolement.

À quels niveaux de bruit est-on exposé en Haute-Savoie ?

La Haute-Savoie, avec son dynamisme économique et ses multiples activités extérieures, n’est pas épargnée. Entre les métiers de l’industrie, du BTP, les ateliers artisanaux, mais aussi le tourisme – stations de ski, bars, festivals –, les risques sont variés. Le département compte également de nombreux adeptes de sports mécaniques, dont le bruit des engins n’est pas anodin.

Source de bruit Niveau en dB
Moto à l'accélération 95 à 110 dB
Compresseur de chantier 85 à 90 dB
Piste de ski (enneigeuse, ski-dome, remontée mécanique) 80–90 dB selon équipements
Discothèque/festival 100 à 105 dB
Atelier menuiserie 90 dB
Chantier BTP 85–100 dB

Il est donc essentiel d’adopter de bonnes pratiques pour protéger son audition dans ces environnements quotidiens.

Focus : Traumatismes sonores aigus, être vigilant “même pour une seule fois”

Un seul événement sonore trop intense peut suffire à endommager définitivement l’audition. On parle alors de traumatisme sonore aigu. Les exemples les plus fréquents sont :

  • Feux d’artifice à proximité
  • Travaux ponctuels avec outils puissants sans protection (perceuse, meuleuse, marteau-piqueur)
  • Concert ou boîte de nuit près des enceintes
  • Détail marquant : le niveau sonore d’un tir de fusil peut dépasser 140 dB, largement au-dessus du seuil de danger immédiat de 120 dB (Assurance Maladie).

Le lendemain, ou parfois dès le moment même, apparaissent des acouphènes ou une impression d’oreille “cotonneuse”. Il ne faut pas attendre, et consulter en urgence pour évaluer les dommages et maximiser les chances de récupération.

Professionnels et adolescents : des publics particulièrement à risque

Selon une enquête de Santé Publique France publiée en 2021, 7% des salariés exposés à des niveaux supérieurs à 85 dB présentent une perte auditive avérée (source : Santé Publique France). Mais les loisirs bruyants exposent tout autant les jeunes :

  • Plus de 30% des ados de 15 à 17 ans utilisent un casque audio à fort volume chaque jour
  • L’exposition dans les bars et concerts peut doper le risque d’acouphènes temporaires, premier signe d’une atteinte de l’oreille

À noter : les chiffres de l’OMS montrent que la France fait partie des pays européens les plus à risque de surdité due au bruit dans la jeunesse (source : UniVadIs).

Diagnostic : quand consulter ?

Il est souvent difficile de réaliser qu’on entend moins bien, tant la surdité liée au bruit est progressive et insidieuse. Mais plusieurs situations peuvent amener à consulter un spécialiste ORL :

  • Acouphènes persistants après une exposition à un bruit fort
  • Diminution récente de l’audition (parole “déformée”, bruits lointains…)
  • Antécédents d’exposition régulière à des bruits puissants
  • Entourage qui mentionne une perte d’audition

L’audiogramme, réalisé par un ORL ou un audioprothésiste, permet de mesurer la perte auditive et d’en préciser la cause.

Peut-on retrouver son audition après un traumatisme sonore ?

La récupération spontanée est rare pour une surdité installée. Après un traumatisme récent (moins de 48h), certains traitements sous contrôle médical (corticoïdes) peuvent limiter les lésions. Mais la meilleure approche reste la prévention. Les cellules ciliées détruites ne repoussent pas, ce qui rend la perte irréversible.

Les aides auditives, adaptées après bilan, permettent de compenser certaines pertes mais ne restituent jamais complètement la performance d’une audition d’origine.

Les gestions du quotidien face au bruit : des solutions concrètes

  • Port de protections auditives : bouchons en mousse, casques antibruit (type chantier), bouchons sur mesure pour musiciens ou professionnels. Beaucoup de pharmacies et de magasins spécialisés sur Annecy et en Haute-Savoie proposent des solutions adaptées.
  • Limiter volume et durée : préférer des pauses régulières, réduire le volume des écouteurs (idéalement en dessous de 60% du maximum), éviter d'utiliser de la musique ou des outils sonores dans des lieux confinés.
  • S’informer sur les niveaux de risque : beaucoup de smartphones affichent aujourd’hui le niveau sonore instantané avec les écouteurs (fonction “sonomètre”).
  • Équipements protecteurs sur les lieux de travail : la réglementation impose leur mise à disposition au-delà de 80 dB pendant 8h.
  • Sensibiliser les proches : ne pas hésiter à parler du risque auditif en famille, à l’école, dans les clubs de sport ou associations locales.

En Haute-Savoie, plusieurs campagnes de prévention sont menées chaque année via les mutuelles, la médecine du travail, les services d’ORL des hôpitaux comme le CH Annecy Genevois ou les centres auditifs. Des tests auditifs gratuits sont proposés lors d’événements locaux – renseignez-vous auprès de la MAIF, la Mutualité Française ou l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes.

Ressources et associations pour s’informer ou se faire aider

  • Surdité France (surdi.info) conseille sur la prévention et l’orientation vers les professionnels compétents.
  • Association France Acouphènes propose écoute et informations sur les acouphènes liés à la surdité professionnelle ou de loisir.
  • MDA (Maison Départementale de l’Autonomie) de Haute-Savoie accompagne salariés, familles et employeurs dans les démarches de reconnaissance et d’aménagements.

Ne sous-estimez pas l’impact du bruit sur l’audition, surtout lorsque l’exécution de son métier, une passion ou les sorties en famille sur le territoire imposent une exposition, même ponctuelle. Parce que l’oreille ne se répare pas, chaque geste de prévention compte pour préserver la richesse de notre quotidien sonore… sans la subir.

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